Mais qui veut la peau de Mme Dittli?

A grands fracas, aux nouvelles de la RTS hier soir 8 octobre, on annonçait que Mme Dittli, conseillère d’Etat du canton de Vaud, était prévenue dans une enquête pénale pour abus d’autorité.

La RTS rappelait que trois plaintes avaient été déposées contre Mme Dittli, une pour violation du secret de fonction (art.320 du code pénal), une pour abus d’autorité (art. 312),  une dernière enfin pour avoir éventé le rapport Studer avant qu’il soit rendu public, donc pour publication de débats officiels secrets (art. 293), c’est-à-dire avoir favorisé des fuites dans la presse.

La Télévision indiquait que le procureur du canton de Vaud avait classé sans suite l’accusation de la violation du secret de fonction, après avoir entendu Mme Dittli, mais ouvrait une enquête sur le deuxième chef d’accusation, l’abus d’autorité, accusation la plus grave, (crime proprement dit) et réservait à plus tard la question des fuites du rapport Studer dans la presse.

Précisons encore que l’abus d’autorité est passible d’une sanction allant jusqu’à cinq ans de privation de liberté.

Il a été clairement dit à la télévision qu’au stade actuel, Mme Dittli reste présumée innocente. Mais évidemment que quelques députés se demandent s’il ne faudrait pas « suspendre » Mme Dittli de ses fonctions pendant l’enquête. Toutefois le droit vaudois ne prévoit pas une telle mesure.

Qu’est-ce que l’abus d’autorité ?

Le code pénal le définit ainsi : « Les membres d’une autorité et les fonctionnaires qui, dans le dessein de se procurer ou de procurer à un tiers un avantage illicite, ou dans le dessein de nuire à autrui, abusent des pouvoirs de leur charge sont punis d’une peine privative de liberté de cinq ans au plus ou d’une peine pécuniaire » (c’est moi qui ai souligné).

Il s’agit donc, pour pouvoir condamner l’auteur d’une telle faute, qu’il ait 1) abusé de son pouvoir, c’est-à-dire qu’il ait accompli ou ordonné d’accomplir un acte qui n’entrait absolument pas dans sa fonction et 2) qu’il l’ait fait pour en tirer un avantage pour lui-même ou pour nuire à quelqu’un. Les deux éléments doivent être réunis pour que l’infraction soit objectivement réalisée. Mais encore faut-il que l’auteur ait eu l’intention d’excéder son pouvoir et d’en tirer un avantage ou de nuire de ce fait à autrui. C’est là ce que l’enquête devra établir. La négligence n’est pas punissable.

Différence entre « l’affaire Dittli » et ce que j’appelle « l’affaire Broulis », soit l’affaire du « bouclier fiscal »

Dès qu’elle a su que l’enquête était ouverte, Mme Dittli a déclaré devant la presse  – et le journal Le Temps en a rendu compte – qu’elle collaborerait pleinement à l’établissement des faits. Elle ne s’est d’ailleurs pas opposée à la levée de son immunité.

En réponse à la motion de 55 députés demandant une commission d’enquête parlementaire au sujet de l’affaire du bouclier fiscal, le Conseil d’Etat propose aux parlementaires de refuser la constitution d’une telle commission et ce, pour des motifs futiles résumés dans un précédent Billet de mon blog (« La grande amnésie du fisc vaudois »,  17 septembre dernier). En outre, le Conseil d’Etat a mandaté un expert, évidemment sans pouvoir de coercition, et a prévenu à l’avance les personnes qui seraient interrogées par lui en leur communiquant, à l’insu de l’expert, les questions prévues !!!

Tout se passe au donc comme si Mme Dittli avait la conscience tranquille à la différence des Conseillers d’Etat passés et présents qui n’auraient nullement envie qu’on « remue » leur passé récent.

Ce serait tellement plus confortable de faire pendre la « jeunette », la « petite dernière » qui a encore un léger accent suisse-allemand et représente un parti politique quasiment inexistant dans le Canton plutôt que de découvrir les « squelettes » laissés par ses prédécesseurs !

 

Et si les drones…

Et si les drones qui hantent les ciels de quelques États européens étaient israéliens ? M. Netanyahou avait promis des représailles après que plusieurs États de l’Union européenne ont reconnu l’État palestinien. Envoyer des drones de manière – sans causer de dégâts – à compliquer la vie de certains États, à engendrer une inquiétude à cause de la guerre en Ukraine, ce serait une technique machiavélique mais bien en accord avec la nature de M. Netanyahou. La Russie nie être à l’origine des survols, mais ne va pas « trahir » son « non -ennemi » et s’amuse peut-être bien de la panique naissante des Etats membres de l’OTAN et ce d’autant plus que les Etats-Unis, par la voix de leur Président, entendent laisser les Européens se débrouiller seuls pour défendre l’Ukraine maintenant qu’ils se sont engagés à augmenter leurs moyens militaires au sein de l’OTAN.

Espérons seulement qu’à trop jouer avec les allumettes les va-t-en guerre ne provoqueront pas l’incendie!

Le goujat!

Lors de la cérémonie en hommage à M. Charlie Kirk, assassiné par un opposant à ses idées et à son action, sa veuve a déclaré publiquement, très émue, qu’elle pardonnait au jeune homme, auteur de l’assassinat.

Enchainant alors, M. Trump a claironné que, lui, il haïssait ses adversaires (c’est la traduction à la RTS de ses mots que je n’ai pas entendus directement).

Une telle déclaration ne serait que banale, conforme à un sentiment commun, très répandu (c.f. M. Netanyahou !), mais faire cette déclaration en « hommage » à Mme Kirk qui venait de faire preuve d’une générosité et d’une force morale impressionnantes, ce n’était pas se montrer vertueusement honnête, c’était juste agir en goujat !

Dans une situation semblable, un honnête homme se serait simplement tu sur le sujet. Mais pour être un honnête homme, il faut du cœur et de l’éducation ! Qui ne peut, ne peut. A bon entendeur, salut !

La grande amnésie du fisc vaudois

Les députés vaudois viennent de recevoir le Rapport du conseil d’Etat sur une « motion… demandant l’institution d’une commission d’enquête parlementaire » (CEP) « pour faire la lumière sur les dysfonctionnements liés à l’application du bouclier fiscal et à la conduite du département des finances ».

Commentaire :  Précisons qu’il s’agit des années antérieures à la législature actuelle.

Le Conseil d’Etat conclut à l’inutilité d’une telle commission d’enquête pour les motifs suivants :

  • (p.21 du rapport du Conseil d’Etat) L’événement n’est pas d’une grande portée. « L’application du bouclier fiscal a des effets limités » (peu de contribuables concernés – « entre 1000 et 4000 , soit entre 0,2 et 0,8 % de l’ensemble des 500’000 contribuables vaudois »), effets financiers globaux peu importants « indépendamment du système utilisé (entre CHF 40 et 80 millions par an au maximum…soit environ 1% des recettes de l’impôt cantonal et communal sur le revenu et la fortune ; … il faut rappeler que les contribuables au bénéfice du bouclier ont versé entre 3 et 5% du total de l’impôt sur la fortune de l’Etat et des communes ». En outre, on ne peut pas établir les conséquences réelles de l’application du régime légal plutôt que de celui erroné.

Commentaire  (c’est moi qui ai mis en gras): en deux mots, la perte n’est que de quelques  dizaines de millions ! Et on ne va pas se compliquer la vie alors que les contribuables concernés paient de toute manière beaucoup d’impôts.

  • (Rapport, p. 21) « Les personnes interrogées par l’expert ont toutes confirmé que durant ces années, le bouclier fiscal n’était pas un thème politique.»

Commentaire : donc sujet sans importance !

  • (p.22) « La CEP n’a pas pour vocation de mener des recherches historiques, ni de « « refaire l’histoire » » pour utiliser une expression consacrée. »

Commentaire : c’est bien connu, les enquêtes ne concernent jamais le passé !

  • (Même page) « Les motionnaires fustigent une pratique administrative qui a été indirectement jugée contraire au droit » (commentaire: par un jugement du Tribunal fédéral !). « Or il arrive fréquemment que les tribunaux admettent des recours contre des décisions qu’ils jugent précisément contraires au droit et remettent ainsi en cause des pratiques établies parfois depuis plusieurs années … » (deux exemples sont donnés concernant des jugements du Tribunal cantonal condamnant des conditions de détention dans certains établissements carcéraux) sans que cela ait « amené le Grand conseil à constituer une CEP lorsqu’il en a été requis en 2017 ».

Commentaire : laissez braire les Tribunaux !

  • (Même page) Depuis 2022, le bouclier fiscal est appliqué de manière conforme au droit et, en outre, en juin 2024, le Conseil d’Etat a « décidé de proposer au Grand Conseil d’en revenir à la pratique antérieure à 2022…. Et a agi en toute transparence dans ce dossier » (c’est moi qui ai souligné).

Commentaire : Circulez, il n’y a plus rien à voir.

  • (p.23) « Le Conseil d’Etat entend en outre prendre des mesures complémentaires afin d’améliorer le fonctionnement de la Direction générale des finances dont le rôle est essentiel pour l’Etat » (suit une liste de mesures).

Commentaire : on a pris toutes les mesures pour le futur.

  • (p.23, Conclusion) : la motion demandant une commission d’enquête peut être classée !

 

A l’appui du refus d’une enquête parlementaire, le Conseil d’Etat produit le rapport demandé par lui à M. François Paychère, dr en droit, dans le but de « rassembler les éléments de fait pertinents afin de déterminer les écarts possibles entre les normes du droit fiscal cantonal et leur application ».

D’entrée de cause, ledit rapport signale une particularité (p. 4, ch. III) : « Le mandataire ne disposant d’aucun pouvoir coercitif, la bonne exécution du mandat dépendait notamment de la bonne collaboration des autorités et des personnes qu’il a entendues. Sa mission a été rendue plus difficile par la décision, prise par le Conseil d’Etat …. sans en conférer avec le mandataire, de communiquer aux personnes avec lesquelles il comptait s’entretenir la liste des questions auxquelles il lui appartenait de répondre (c’est moi qui ai souligné). Certains interlocuteurs avaient ainsi préparé des réponses à des questions qui ne correspondaient pas à leurs fonctions ou tenaient à s’exprimer sur des points sans pertinence en ce qui les concernait ».

Commentaire : Chacun appréciera à sa juste valeur cette manière du Conseil d’Etat de prendre, dans le dos du mandataire, des contacts avec les personnes que ce dernier devait interroger !

Mais ce qu’il y a de plus frappant, c’est l’amnésie des personnes concernées par « l’affaire du bouclier fiscal ». Ainsi :

  • (p.29 du rapport) Mme Gorrite ne se souvient pas que, sous sa présidence (2017 à 2022), le Conseil d’Etat ait pris une initiative dans le domaine du bouclier fiscal.
  • (p. 30 du rapport) « Les dérives constatées du modèle de calcul du bouclier ont été identifiées dès 2011… et à nouveau signalées à la hiérarchie du département chargé des finances en 2015. Le seul tempérament qui a été apporté était de donner raison aux contribuables qui déposaient une réclamation ».

Commentaire : on admet la réclamation des mécontents et on n’en parle plus !

L’expert (M. Paychère) a rédigé un rapport complémentaire reprenant certaines questions :

  • (p.5) « M. Broulis, alors conseiller d’Etat et Président du Conseil d’Etat, a répondu par écrit qu’il n’avait « jamais eu d’information sur des problèmes en lien avec le bouclier ».
  • (p.6) A propos d’une note du 27 février 2015 reprenant l’ensemble de tous les défauts déjà mentionnés) : « la directrice générale de la Direction générale des finances … a exposé qu’elle avait dû prendre connaissance de cette note mais ne se souvenait pas de sa teneur ni de la teneur d’une discussion subséquente avec M. Broulis.
  • (p. 7) A propos de la jurisprudence du Tribunal : en 2019, le Conseil d’Etat a-t-il été informé de cette problématique ? « M. Broulis, alors conseiller d’Etat, a déclaré avoir eu connaissance de la jurisprudence du Tribunal fédéral en 2019 … Probablement au second semestre». Le directeur de la division de la taxation, lui-même (et l’ancien responsable de la législation)… a nanti Monsieur Broulis, alors conseiller d’Etat, de cette problématique…  « Il ignore toutefois si et quand l’ensemble du Conseil d’Etat a été informé. »
  • (p.8) « Les sources extérieures au Conseil d’Etat ne permettent pas d’établir si ce Conseil a été informé in corpore en 2019 – ou auparavant – quant aux questions que soulevait le bouclier. …Le Conseil d’Etat est mieux à même de se déterminer sur cette question, dès lors qu’il doit avoir un accès direct à ses propres archives, contrairement à l’expert nommé par ledit Conseil ».

Commentaire : (c’est moi qui ai souligné les différents passages) : en déclarant une commission d’enquête inutile,  de qui le Conseil d’Etat se moque-t-il ?

 

Petit complément à l’article intitulé « Peut-on reconnaître un État qui n’existe pas? »

Le journal « Le Temps » de ce samedi 13 septembre, en page 4, sous le titre « l’ONU soutient un État palestinien » livre une information très intéressante:

Lors de sa séance de vendredi 12 septembre, l’Assemblée générale a adopté la « Déclaration de New York ». Selon le Temps, « le texte préparé par la France et l’Arabie Saoudite, et adopté par 142 voix pour (dont la Suisse) – c’est moi qui ai mis en gras ! -, 10 contre (dont Israël et les États-Unis) et 12 abstentions, est clair. » Il condamne expressément les attaques du 7 octobre par le Hamas contre des civils et exige que le Hamas libère tous les otages détenus à Gaza.

En outre, le texte ajoute : « Dans le contexte de l’achèvement de la guerre à Gaza, le Hamas doit cesser d’exercer son autorité sur la bande de Gaza et remettre ses armes à l’Autorité palestinienne, avec le soutien et la collaboration de la communauté internationale, conformément à l’objectif d’un État de Palestine souverain et indépendant ».

Cette déclaration paraît réaliste et consacre sans ambiguïté le principe des deux États, enjoignant à la communauté internationale de contribuer à la création de  l’État palestinien. Libre alors aux États de s’engager déjà maintenant à reconnaître l’État palestinien quand il existera. Ce qu’il faut d’abord, c’est contribuer à sa création.

Je suis heureuse que la Suisse ait adopté cette « Déclaration de New York » et j’espère de tout cœur qu’elle pourra participer aux multiples et délicates démarches diplomatiques qui seront nécessaires à la réalisation de l’objectif de cette Déclaration.

 

Peut-on reconnaître un État qui n’existe pas?

De longue date, je suis convaincue que seule l’existence d’un État palestinien assurera une certaine sécurité tant au peuple palestinien qu’à l’État d’Israël, mais ma seule conviction suffit-elle à créer un État palestinien ? Évidemment que non. Un État n’existe que s’il a un territoire, une population et une organisation. Je peux donc m’engager à reconnaître un tel État dès qu’il existera et contribuer selon mes moyens à sa création, mais reconnaître un tel État s’il n’existe pas, c’est au mieux se donner facilement bonne conscience, au pire légitimer le Hamas qui exerce sa tyrannie sur le peuple palestinien et qui décide apparemment du sort de celui-ci puisqu’il est seul habilité à négocier un cessez-le feu avec l’État d’Israël.

Je ne peux donc que comprendre la position du Conseil fédéral : à la différence de beaucoup de chefs d’États qui se parent des plumes de la bonne conscience, il ne reconnaît pas un État palestinien qui n’existe pas. Ce que je souhaite en revanche, c’est que le même Conseil fédéral soutienne ou déploie intensément les efforts diplomatiques en vue de la création d’un tel État au nom du droit des peuples à se gouverner eux-mêmes. Le Conseil fédéral doit en revanche observer une grande réserve dans la communication parce que la diplomatie n’est efficace que si elle œuvre discrètement. Elle souffre des rodomontades des chefs d’État qui confondent autorité efficace et publicité personnelle.

Il est hélas ! très difficile de rester discret – donc efficace – dans une société du paraître et du tapage médiatique. J’espère apprendre un jour que notre Pays aura contribué, par sa discrétion, à jouer un rôle positif et déterminant pour les Palestiniens, donc aussi pour l’État d’Israël, comme il l’a fait autrefois pour les Algériens et la France, dans les négociations d’Évian (1959-1962).

 

MEA CULPA

MEA CULPA

J’ai commis une erreur dans mon article précédent : La loi sur le changement de système d’imposition de la propriété du logement a bien été publiée dans la Feuille fédérale de 2025 aux pages 23 ss avec un délai référendaire expirant et expiré au 19 avril 2025. Il y est bien précisé que « la loi n’entrera en vigueur qu’avec l’arrêté fédéral du 20 décembre 2024  » celui donc qui est soumis au vote le 28 septembre ». J’ai ainsi commis une erreur quand j’ai écrit que la loi n’était pas publiée et qu’elle pourrait encore être soumise au referendum, et quand j’ai ajouté qu’on ne nous indiquait pas où se trouvait la garantie juridique que la loi et l’article constitutionnel entreraient en vigueur en même temps.

En revanche, je n’ai pas commis d’erreur quand j’ai affirmé que l’article constitutionnel ne pouvait pas être mis en vigueur simplement par le Conseil fédéral, quand celui-ci le voudrait, comme semble le dire l’arrêté fédéral, car l’objet sur lequel nous votons  n’est pas l’arrêté fédéral mais un article constitutionnel  et c’est la constitution qui fixe son entrée en vigueur.

Chaque fois qu’il y a une proposition de modification de la constitution fédérale – que cette proposition vienne des Chambres fédérales ou d’une initiative populaire -, c’est un arrêté fédéral qui doit la soumettre au vote et la date d’entrée en vigueur de cet arrêté est fixée par le Conseil fédéral, pour permettre la votation. Cette date n’a rien à voir avec l’entrée en vigueur de la modification constitutionnelle.

En vertu de l’art. 195 de la constitution fédérale, une modification constitutionnelle acceptée par le peuple et les cantons entre en vigueur le lendemain du vote. Si on veut modifier cela, il faut prévoir une disposition transitoire constitutionnelle. Il n’y en a pas dans l’arrêté. En conséquence, l’article constitutionnel sur l’impôt immobilier cantonal entrera en vigueur le 29 septembre déjà, s’il est accepté par le peuple et les cantons et, vu que le délai référendaire de la loi a expiré sans être utilisé, la loi devra être mise en vigueur aussi rapidement que possible

Le petit livre rouge contient donc deux énormes véritable erreurs : 1) Nous ne votons pas un arrêté fédéral, mais une modification de la constitution fédérale et, 2) si nous acceptons cette modification, son entrée en vigueur ne peut pas être fixée par le Conseil fédéral mais l’est par l’art. 195 de la Constitution fédérale c’est-à-dire qu’elle sera immédiate.

La conséquence – que ne formule pas le petit livre rouge, évidemment -, c’est que, vu le texte de la loi, celle-ci peut aussi entrer en vigueur dès le 29 septembre. A vrai dire, si on voulait être puriste, on devrait relever que la loi prévoit qu’elle entre en vigueur en même temps que l’arrêté qui nous permet de voter, lequel est naturellement déjà en vigueur puisqu’il règle le vote du 28 septembre!

Je n’ai jamais vu une telle salade !

Une votation piégée, une tromperie gigantesque

 

Le petit livre rouge fédéral qui invite les citoyens à voter vient de nous parvenir. J’en découvre une partie du contenu avec horreur. Et je pèse mes mots ! La tromperie en ce qui concerne le premier sujet (l’impôt immobilier) est gigantesque.

Comme on l’entend depuis le début de la campagne, on ne parle que de la suppression dans une loi  fédérale de l’impôt fédéral sur les loyers fictifs des propriétaires de leur logement. Or, sur quoi votons-nous ? Sur un article constitutionnel  (ce n’est pas une loi  au sens technique!) introduisant la possibilité, pour les cantons, de percevoir un impôt sur la valeur locative fictive des logements secondaires  à usage personnel (camouflé sous l’appellation générale d’impôt immobilier). Autrement dit, on vote sur la fixation dans la constitution fédérale, au sujet des cantons, d’un impôt semblable à celui qu’on prétend supprimer dans une loi fédérale que personne ne connaît. Où trouvez-vous  dans le texte constitutionnel soumis au vote la moindre allusion à la suppression d’un impôt ?

 

Pour essayer de comprendre, je me suis plongée dans le petit livre rouge. Mon premier constat c’est qu’il n’existe pas, à ce jour, de loi fédérale abolissant l’impôt locatif fictif. Accepté par chacune des deux Chambres (p. 7 du livre rouge), le projet de loi  (sic) n’a pas encore été publié dans la Feuille Fédérale, il n’est pas encore « officialisé » et n’est donc pas encore soumis au referendum. La loi pourrait ainsi parfaitement être refusée en vote populaire si référendum il y a après publication. A ce propos d’ailleurs, le petit livre rouge contient un demi-mensonge. En effet, à la p. 10, en haut, il est écrit : « En vertu de la loi fédérale relative au changement de système d’imposition de la propriété du logement, la valeur locative ne sera plus imposable ». Une note en bas de page renvoie à la Feuille Fédérale, mais pas du tout à un texte de loi. Le renvoi concerne l’arrêté constitutionnel sur lequel nous votons et l’avis du Conseil fédéral. Le texte de loi n’est pas publié. C’est absolument scandaleux. On peut nous raconter n’importe quoi.

Et ce n’importe quoi se retrouve aux pages 4 et 8 du petit livre rouge où il est écrit ,à propos du texte soumis à notre suffrage: « L’abolition de l’imposition de la valeur locative est liée juridiquement à la modification de la constitution ».

En fait, il s’agit de dire clairement que ce lien est strictement politique et nullement juridique, puisqu’il n’existe à ce jour aucun texte légal en vigueur consacrant ce lien. Le petit livre rouge le dit clairement en p. 18, où il est écrit : « Le Conseil fédéral et le Parlement approuvent le projet de loi et de modification constitutionnelle » et poursuit, à la même page: « La votation décidera donc de l’ensemble : si l’impôt immobilier spécial est rejeté, l’imposition de la valeur locative sera maintenue », cela signifie-t-il que les Chambres annuleront leur vote final d’un projet de loi abolissant cet impôt et accepté dans chacune d’elles ? Cela mériterait un éclaircissement, mais comme aucun texte légal n’est cité ni peut-être n’existe, on nage dans les nuages !

Notons qu’en p. 8 toujours et pour mieux brouiller les cartes, il est encore précisé : « Les deux objets ne peuvent donc pas entrer en vigueur l’un sans l’autre. L’imposition sur la valeur locative ne sera abolie que si le peuple et les cantons acceptent l’impôt spécial sur les résidences secondaires ». C’est très clair, mais selon l’article 195 de la Constitution fédérale, « La Constitution révisée totalement ou partiellement entre en vigueur dès que le peuple et les cantons l’ont acceptée ». Or il faut une disposition transitoire précise pour déroger à la Constitution. La simple indication dans le petit livre rouge (p. 20) que « Le Conseil fédéral fixe la date de l’entrée en vigueur » est inadmissible, car cela signifie nettement autre chose que le lien garanti entre l’entrée en vigueur de la loi et celle de l’article constitutionnel. C’est une honte !

J’ai toujours été opposée à l’impôt locatif fictif et ai fait campagne contre son introduction, en son temps, au sein du Parti libéral ; je ne peux évidemment que voter NON à son introduction déguisée dans la Constitution fédérale, même sous un angle réduit, et ne saurais croire un mot des promesses contenues dans le très malhonnête charabia officiel.

 

 

 

 

Le phénomène suisse des langues

Le phénomène suisse des langues

Excitation maximale dans le landerneau helvétique : le canton de Zurich n’enseignera le français qu’à partir de l’école secondaire. On crie à la trahison de « l’entente confédérale ». Mais de quoi s’agit-il ?

Selon l’art. 4 de la Constitution fédérale, « Les langues nationales sont l’allemand, le français, l’italien et le romanche. » Dans quels cantons enseigne-t-on obligatoirement le romanche par esprit « confédéral » ? Dans quels cantons l’italien est-il obligatoire par esprit « confédéral » ?

Certes ! Le français est, en importance, la 2e langue nationale. C’est bien « la langue » parlée par les autochtones, leur langue de cœur, mais l’allemand, lui, n’est pas la langue parlée par les autochtones en Suisse allemande, ce n’est pas leur langue de cœur ; quand les petits Suisses allemands entrent à l’école, ils découvrent l’allemand. C’est presque une langue étrangère qu’ils doivent apprendre alors qu’ils parlent le suisse-allemand. Certes, les deux idiomes germaniques ont des similitudes, mais l’allemand est une langue écrite, construite, comme le français et l’italien.  En plus de la langue qu’ils parlent, les petits élèves suisses-allemands doivent donc apprendre à « construire » une autre langue, l’allemand. Les petits Romands, eux, parlent naturellement la langue dont ils peuvent commencer à apprendre la construction dès qu’ils entrent à l’école.

Le français, l’allemand, l’italien, sont des langues internationales qui donnent accès à une culture plus vaste que la culture suisse. Elles impliquent une autre approche que celle requise par les langues exclusivement locales telles que le Suisse-allemand – et même d’ailleurs que le romanche. L’oreille ne suffit pas et je dirais que l’apprentissage par l’oreille seulement est un risque de trahison de la culture.  Il est bon que les élèves aient déjà une certaine maturité pour « entrer » dans une langue de culture internationale et en acquérir non seulement la technique, mais aussi l’esprit. La meilleure coexistence confédérale est assurée par la compréhension et de la langue et de l’esprit de l’autre ethnie. Le problème, c’est que le suisse-allemand n’est pas une langue internationale et qu’il donne l’accès à des cultures très localisées, importantes  certes  mais très diverses. Seul le séjour dans un canton d’outre-Sarine permet de percevoir la richesse d’une culture locale.

Or ni le français ni l’allemand ni l’italien comme tel ne transmet l’âme du canton dont c’est la langue officielle. Il faut aussi avoir vécu sur place. Laissons donc à chaque canton la liberté de décider à quel âge ses enfants sont le plus aptes à acquérir les connaissances permettant de s’approprier une ou deux des langues « officielles » du Pays et gardons-nous de voir autre chose dans cette décision qu’une recherche pédagogique et légitimement fédéraliste.

Le cas spécial de l’anglais

L’anglais a été une langue de culture. Il est devenu un instrument commercial et un moyen d’uniformisation des esprits. Par pur sens « pratique » et « économique », l’enseignement de l’anglais tend à être préféré à celui des langues nationales. Il faut pouvoir le baragouiner dès son plus jeune âge. Il présente des analogies avec l’allemand comme avec le français et paraît assez facile à acquérir aussi bien pour les germanophones que pour les francophones. La paresse naturelle incite à préférer l’immédiatement utile au culturel, plus « désintéressé ».  C’est là un problème de civilisation qui dépasse largement le cadre des relations intercantonales. La question qui se pose est la suivante : l’école doit-elle favoriser la soumission à une mode consumériste ou l’ouverture à la culture ?

Le débat sur l’harmonisation scolaire ne semble pas souvent porter sur cette question.

 

 

 

 

La grande farce ?

Si la guerre d’Ukraine n’était pas aussi terrible du fait du nombre de morts, on serait tenté de dire que, depuis 24 heures, c’est devenu une énorme farce : qui pourrait imaginer sérieusement que M. Poutine, considéré dans tous les Etats européens, dont la Suisse, comme « persona non grata » à cause du mandat d’arrêt lancé contre lui par le Tribunal  Pénal International (TPI), viendrait à Genève, au bénéfice d’une immunité spéciale accordée par le Conseil fédéral, discuter de paix avec M. Zelensky, applaudi, lui, par tous comme un héros?  M. Macron le savait naturellement – c’est une pure question de bon sens ! – et sa proposition irréaliste d’une rencontre à Genève avait peut-être pour but de proposer un susucre à la Suisse en vue des accords européens à venir. On sait que, pour l’Union européenne, un rejet de ces accords en votation populaire serait ressenti comme une humiliation. La démocratie directe est un défaut insupportable !…

Et la Suisse de roucouler, aux Nouvelles de ce soir, en répétant la proposition de M. Macron.

 

Sans surprise aucune, M. Poutine n’entend pas se rendre à Genève, mais veut rencontrer M. Zelensky à Moscou. S’il devait choisir un lieu plus « neutre » que la Russie, M. Poutine se tournerait sans doute vers un Etat ne reconnaissant pas la juridiction du TPI. A ce point de vue-là, l’Alaska était parfait, mais ne conviendrait pas pour une rencontre sans les Européens ni M. Trump. Tant qu’à faire, autant recevoir « l’ennemi » chez soi. Mais sera-t-il d’accord ?

 

Toujours aux Nouvelles de ce soir 19 août, il est rappelé combien la paix entre la Russie et l’Ukraine devrait garantir la sécurité de l’Ukraine. Si l’Ukraine n’est pas membre de l’OTAN il est évident qu’elle ne pourra pas se prévaloir de l’article 5 de la Charte pour demander l’aide européenne, et que les Etats européens ne pourront pas non plus invoquer ledit article pour aider l’Ukraine. Contrairement à ce qui a été affirmé lors des 75 ans de l’OTAN (voir l’article du 4 avril 2024 intitulé : « Le mensonge de l’OTAN ou de la RTS »), « une attaque armée survenant en Europe » n’est pas considérée comme « une attaque contre toutes les Parties » ; seule une « attaque armée contre l’une des Parties » est considérée comme une attaque contre toutes les Parties. Pour assurer une protection de l’Ukraine – qui ne serait pas membre de l’OTAN – en cas de nouvelle attaque par la Russie, il faudrait un traité autre que celui de l’OTAN. M. Trump serait-il en train de préparer de cette manière le désengagement des Etats-Unis par rapport à la défense des pays de l’UE et de tendre ainsi la perche à M. Macron pour une future défense européenne ?

Dans le jeu de dupes de ces pourparlers de paix dont on espère – quoi qu’il en coûte ? – qu’ils mettront réellement fin à ce massacre humain soutenu par l’OTAN et encouragé par les membres de l’UE, il est fondamental de rester froidement lucide pour éviter de se faire rouler dans la farine par les égos de quelques chefs d’Etat.